Hyacinthe RIGAUD

(1659 Perpignan – 1743 Paris)

Portrait de Wenzel von Sinzendorf, ambassadeur d’Autriche à Versailles

Huile sur toile

H. 73 cm ; L. 63 cm

1700 ou 1701

Provenance :

– Stockholm, 1918, vente Hoving et Winborg des 23/26 septembre, N°55, comme Largillière
– Paris, 1946, commerce de l’art
– Collection E. Heijne
– Stockholm, 1994, vente Bukowski du 30 novembre, N°322, comme entourage de Largillière
– Londres, 1995, vente Christie’s du 6 juillet, N°525, comme suiveur de Rigaud

 

Bibliographie : Ariane James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659- 1743), Dijon, éditions Faton, 2016, T. II : Le catalogue raisonné, n° P.747, p. 249

Stéphane Perreau, Hyacinthe Rigaud, Catalogue concis de l’œuvre, Nouvelles presses du Languedoc, 2013, N° P.701, p. 162

Après des formations successives à Carcassonne et surtout Montpellier et Lyon, Rigaud arrive à Paris à 1681 et y remporte le prix de Rome de peinture en 1682. Sur les conseils de Charles Le Brun, plutôt que de faire le traditionnel voyage en Italie, il se consacre exclusivement au portrait, genre qu’il élèvera à sa plus haute expression et qui lui procurera gloire et fortune. Il se fait remarquer du roi et de la Cour avec le portrait de Monsieur, en 1688 puis par celui de Louis XIV, en armure, livré en 1694. Mais c’est surtout le portrait en costume de sacre, daté de 1701, qui assure la célébrité du peintre. Véritable emblème de la monarchie française, il fige définitivement l’image du portrait d’apparat : colonne et paysage en arrière-plan, draperie chatoyante, pose solennelle, couleurs intenses. Les souverains français et européens, comme tous les grands noms de l’époque (ministres, militaires, artistes, financiers…), passeront devant son chevalet.

 

Le diplomate autrichien Philipp Ludwig Wenzel, comte de Sinzendorf (1671-1742), natif de Vienne, fut notamment ambassadeur en France à Versailles entre 1699 et 1701. Il occupa ensuite les mêmes fonctions aux Pays-Bas en 1709, avant de diriger la Compagnie des Indes autrichienne (créée en 1719) en 1721. Amateur de bonne chère, se voulant mécène, mais dur et hautain dans la conduite des affaires, il joua un rôle de premier ordre à la tête du gouvernement impérial autrichien pendant plus de trente ans, et prit part à tous les traités européens de l’époque.
Rigaud réalisa une autre effigie de Wenzel de Sinzerdorf en 1729 (aujourd’hui conservé au Kunst historisches Museum de Vienne, 1,66 x 1,32 m), lorsque le diplomate se trouvait à Soissons en 1728 pour négocier les termes de la paix de la guerre anglo-espagnole. Autant notre portrait au cadrage serré montre un homme encore jeune et se concentre sur l’expressivité du regard, autant le portrait de 1729 relève davantage de l’apparat et illustre la réussite du modèle.

 

Notre portrait, exécuté en 1700 ou 1701, fut livré dans les premiers mois de 1701, puisque le 22 août, Sinzendorf faisait ses adieux à Louis XIV pour retourner en Autriche. Acquis auprès de Rigaud pour la somme de 300 livres (qui incluait également le portrait de Regina – née Valdstejna, la femme de Sinzendorf, de localisation aujourd’hui inconnue), il fut repris en gravure en 1713, par Bernard Picart, alors établi en Hollande tout comme Sinzendorf; Picart, pour préparer son estampe, réalisa une sanguine (33 x 27 cm) dans le même sens que notre tableau, très fidèle à la peinture, mais la gravure présentait des différences dans la disposition du vêtement. Précisons que deux copies, oeuvres de collaborateurs de Rigaud, furent également livrées en 1701, celle du comte exécutée par Claude Bailleul, et celle de la comtesse par Charles Viennot (qui s’était déjà chargé du vêtement dans la version originale de Rigaud).

 

Exécuté entre les grandes représentations de Bossuet (en 1700) et du Roi-Soleil (en 1701), quelques mois après sa réception à l’Académie Royale, et donc à l’apogée de sa carrière officielle, notre tableau, dans un style plus intimiste, est cependant pleinement représentatif de l’art de Rigaud: traitement virtuose des étoffes (ici un velours violine particulièrement épais, onctueux et chatoyant), noblesse de l’expression du visage qui donne à ses modèles un air inévitablement presque « louis quatorzien », et ces fameuses « humeurs », petits points blancs qui animent le regard.

VENDU

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