Henri DELUERMOZ
(Paris 1876 – Paris 1943)
Chez le maréchal ferrant
Huile sur métal. Deux plaques soudées
H. 145 cm ; L. 100,5 cm
Signée en bas à gauche
Formé auprès d’Alcide-Joseph Lorentz et de Charles Gleyre, il s’impose comme un artiste réaliste polyvalent : peintre, dessinateur, graveur et lithographe. 
Henri Deluermoz fit ses premiers pas de peintre dans les ateliers de deux maîtres marquants de leur temps : Gustave Moreau, figure du symbolisme, et Alexandre Roll, attaché au réalisme social et aux grands chantiers parisiens. Parallèlement, il s’initia à la gravure, reproduisant les œuvres d’autres artistes pour subvenir à ses besoins, tout en poursuivant une recherche personnelle. 
 
La Première Guerre mondiale interrompit pendant quatre ans son travail et son étude des animaux. Durant ce conflit, il réalisa une série consacrée aux massacres et aux victoires. À la fin des hostilités, il retrouva le Jardin des Plantes et le zoo de Vincennes, où il observa avec attention la morphologie et le caractère des fauves, qui devinrent sa principale source d’inspiration. 
 
Ses premiers dessins, aquarelles et peintures, encore marqués par l’influence de ses professeurs, se distinguent par un trait appliqué et sensible. Mais ce n’est qu’au milieu de sa carrière qu’il affirma véritablement son style : un dessin ample et énergique, dominé par la recherche du mouvement animal. 
 
Ses participations régulières à la Société Nationale des Beaux-Arts, dont il rejoignit le conseil d’administration, assurèrent sa reconnaissance et attirèrent collectionneurs français comme étrangers. 
 
Habitué à la gravure, il s’orienta tout naturellement vers l’illustration. Comme Jouve, il fut séduit par l’univers du Livre de la Jungle de Kipling et illustra les aventures de Mowgli, mais aussi Histoire de Bêtes de Louis Pergaud et Les Bestiaires de Montherlant, où son talent de dessinateur trouva un terrain privilégié. 
 
En dehors de la forêt africaine qui l’inspirait, Deluermoz s’intéressa également à l’Amérique. Ces terres fascinaient les artistes du début du XXe siècle, qui y cherchaient les traces d’expressions premières et brutes, sources d’inspiration pour des créateurs comme Picasso ou Braque. 
 
D’abord adepte d’une palette vive et acidulée, Deluermoz évolua vers des tons plus sobres, proches de la terre et de la végétation, afin de restituer l’essence même de la nature. Il n’hésitait pas à isoler un détail — une oreille, une patte — transformant l’animal en pur motif graphique. 
 
Ce grand panneau de métal que nous présentons nous questionne sur son utilisation. Cintré en partie haute, faisait-il office d’enseigne commerciale pour un maréchal ferrant ? Le support peut le laisser penser, mais la finesse de l’œuvre nous fait douter. 
Le cheval, cabré, est omniprésent dans l’œuvre de Deluermoz, souvent avec une robe grise ou blanche, voire même rouan par les colorations de notre fond. Ces chevaux sont vus dans toutes les situations. Scènes médiévales de tournois, montés par des Apaches, par le maréchal Lyautey, sauvages en pleines steppes, ou encore comme ici, domestiqué mais peu enclin à se plier à notre maréchal (ferrant cette fois) pourtant bâti comme un lutteur.